Être un artiste talentueux ne suffit pas pour obtenir un atelier au village des arts. En effet, alors que le contrat d’occupation dit clairement que l’artiste bénéficiant d’un espace de travail ne peut pas y passer plus de 3 ans, des artistes bafouent gracieusement cette règle. Certains y ont fait plus de 20 ans et se font gracieusement entretenir par le contribuable Sénégalais. Qui leur paye l’eau et l’électricité alors qu’ils gagnent suffisamment leur vie. Ironie de l’histoire, des jeunes talents à la quête de cadre d’expression occupent d’une manière anarchique la voie publique.
Coincé entre la cité des magistrats et le stade Léopold Sédar Senghor, le village des arts est un havre de paix propice à la création. Loin des bruits de la ville, ce sanctuaire de la création est idéalement logé. Sa position géographique favorise le fait qu’il soit visité que par les acteurs ou professionnels des arts. A cet effet, 50 ateliers s’attèlent à faire vivre l’art contemporain sous toutes ses formes.
Ainsi de la peinture à la fonderie en passant par la sculpture, l’audiovisuel sans oublier la céramique, tous les arts y sont représentés. Une galerie d’exposition accompagnée d’une résidence et d’un restaurant et 50 espaces de travail occupent les 2 ha de superficie du village des arts.
Tout a été fait pour permettre aux artistes de s’épanouir. L’électricité et l’eau y sont gratuites tout comme les espaces de travail. Une situation qui attise la convoitise. Pour y avoir un atelier, l’artiste doit fournir un dossier composé d’une demande manuscrite et d’un Cv à la direction des Arts. Car pour éviter les traitements de faveur, l’artiste qui y détient un espace de travail ne doit pas y faire plus de 3 ans.
Un tour au village des arts permet de constater que cette règle est gracieusement bafouée. Des artistes y ont fait plus de 20 ans alors que le contrat d’occupation stipule que l’occupant bénéficiant d’un atelier doit y passer 2 ans et une année en option. Passé ce délai, il doit céder l’espace de travail. Comment une telle situation peut-elle s’expliquer ? Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi des artistes qui vivent bien de leur art peuvent-ils occuper illégalement les lieux alors que des jeunes talents en quête de cadre d’expression cherchent désespérément des espaces de travail ? Pourquoi le contribuable Sénégalais continue-t-il d’entretenir des personnes qui gagnent suffisamment bien leurs vies ? Voilà des questions qui ont poussé Africulturelle à se rendre au village des arts pour obtenir des réponses.
Organisés comme une montre, les artistes trouvés sur place n’ont pas voulu répondre. Entre des responsables de l’association des artistes qui soulignent notre manque de professionnalisme pour avoir débarqué sans prévenir et des artistes qui refusent de piper mot sans l’aval de la hiérarchie, on s’est déplacé 3 fois au village des arts sans obtenir des réponses. Des menaces à peine voilées ont été proférées. « Je me suis dit que j’allais appeler personnellement ton patron pour savoir ce qui se passe.» a même lâché un responsable devant notre insistance. Il s’est même demandé si afriCulturelle n’a pas été « téléguidé ».
Il faut noter que l’espace qui abrite le village des arts a été le campement des Chinois lors de la construction du stade Léopold Sédar Senghor. Une fois, l’infrastructure terminée, le site a été laissé à son sort. Dans les années 90, les artistes ont entamé des démarches pour récupérer le site. De ses tractations, la présidence de la République a affecté le site au ministère de la Culture. Qui, en retour, l’a cédé aux artistes avec des conditions.
Au départ, le site faisait 4 ha. Mais la construction de l’immeuble Ker Yoff et la cité des magistrats y a déduit 2 ha. C’est en 1998 que le premier ministre Habib Thiam au côté de Elimane Kane, ministre de la culture à l’époque, ont inauguré officiellement le village des arts de Dakar. Le contrat entre le ministre de la Culture et les occupants stipule que l’espace de travail est mis à disposition de l’artiste pour une durée de 2 ans. Au terme de ces 2 ans, l’artiste qui souhaite une prolongation peut disposer d’une année supplémentaire non renouvelable. Après, il doit céder l’atelier.
